Les acteurs de la chaine de répression (unités opérationnelles de police et de gendarmerie, Parquet, Tribunal) de la région de l’Ouest se sont retrouvés le 20 décembre dernier au CIPCRE pour réfléchir sur la nécessité d’accompagner l’effort de renforcement de l’application du cadre juridique de protection des enfants. 

Le CIPCRE a organisé un atelier régional sur les bonnes pratiques judiciaires de protection des droits des enfants victimes de violences sexuelles et de discriminations sexistes durant le 20 décembre 2016 en son siège à Bafoussam. Les participants sont venus des villes de Bafoussam, Foumbot et Foumban. Ils étaient au nombre de vingt cinq parmi lesquels des magistrats, des OPJ et un enseignant de l’Université de Dschang. Cet atelier a été l’occasion de renforcement mutuel des capacités et d’échange d’expériences entre les principaux acteurs de la chaine de répression. Les acteurs de la justice ont ainsi été amenés à s’approprier les dispositions du nouveau Code pénal en lien avec la protection des enfants et à capitaliser les bonnes pratiques judiciaires de protection des droits des enfants victimes de violences sexuelles et de discriminations sexistes.

L’implication des acteurs de la chaine de répression

Au regard de l’évolution de la société, l’exigence de sécurité de l’enfant apparait comme la garantie de l’équilibre de la société moderne. Le représentant du président de la Cour d’Appel de l’Ouest, dans son propos d’ouverture des travaux, a souhaité que les participants s’activent avec passion et zèle dans l’optique de partager leurs expériences en matière de bonnes pratiques judiciaires. Il faisait suite aux propos de bienvenue du CIPCRE transmis par le coordonnateur technique du projet en cours, en remplacement du directeur général empêché. Ces discours ont fait place aux échanges et débats à partir de trois thématiques importantes.

La première thématique portant sur « la problématique, l’état d’avancement et les innovations du cadre légal » a été répartie en deux sous-thèmes dont l’un sur “l’état d’avancement de l’intervention judiciaire du CIPCRE“ et l’autre sur “les approches conceptuelles du droit des enfants et cadre juridique (y compris les innovations du cadre pénal) “.

La deuxième thématique, quant à elle, intitulée « Appui judiciaire à la responsabilité parentale » a été scindée en trois sous-thèmes à savoir “L’arrangement à l’amiable pour les infractions sexuelles faites aux enfants : comment y faire face ? “, “Les jugements supplétifs d’acte de naissance : quelles stratégies pour faciliter leur obtention au regard du nombre élevé d’enfants sans existence légale ?“ et “L’applicabilité de l’obligation légale de scolariser les enfants (Art 355-2 du code pénal).

La dernière thématique a porté sur « les précautions judiciaires de protection des droits de l’enfant victime ». En raison de sa vulnérabilité, les précautions spécifiques doivent être prises au profit de l’enfant victime lors des phases d’instruction et de jugement : le juge met en confiance la victime afin de recueillir son témoignage ; le juge peut ordonner le huis-clos ; l’attitude du juge doit être paternelle ; éviter de la contrarier ; l’audition de l’enfant doit être un entretien plutôt qu’un interrogatoire ; procéder à une “cross examination“ allégée ; le juge peut entendre le mineur en l’absence de son parent soupçonné sans toutefois mentionner ses déclarations sur PV…Précautions lors de l’enquête préliminaire pour la réception de la plainte : lieu d’accueil de la victime (absence d’objets intimidants comme armes, menottes, munitions…) ; non-présence de tierces personnes ; cadre approprié ou aménagé ; mise en confiance de la victime. Pour l’audition de la victime, il est souhaitable que l’enquêteur soit en tenue civile, utilise des termes familiers, évite tout terme blessant ou rugueux, évite des questions directes (qui t’a violée ?), évite les termes juridiques, utilise un ton doux. Tout ceci doit obligatoirement se faire en présence du parent, tuteur, ou/et d’un assistant social à l’exclusion du parent auteur des faits incriminés ou de toute autre personne dont la présence pourrait être nuisible. Les pièces exigibles pour la plainte sont le certificat médico-légal (CML) et l’acte de naissance de la victime.

Résolutions prises

A l’issue des travaux, les participants ont retenu les neuf résolutions suivantes :

  1. Veiller à l’application de la loi relative à la gratuité de l’éducation primaire en sensibilisant les membres de la communauté éducative sur l’exigence des frais d’APEE ;
  2. Saisir les pouvoirs publics au niveau national, régional à l’effet de dénoncer les dérives des APEE ;
  3. Sensibiliser les acteurs de la chaîne judiciaire sur les méfaits de la pratique informelle de l’arrangement à l’amiable dans le cadre des VS ;
  4. Organiser des campagnes de sensibilisation de proximité des parents/populations sur les méfaits et la pratique des arrangements à l’amiable avec le concours des autorités traditionnelles, religieuses ;
  5. Mettre en application toutes les bonnes pratiques identifiées lors des débats ;
  6. Poursuivre l’amélioration de la procédure de jugements supplétifs en termes de célérité, de flexibilité ;
  7. Sensibiliser à la base les parents sur le respect des délais de déclaration de naissance ;
  8. Orienter l’application de l’article 355 CPC plus vers la responsabilisation des parents que vers la répression ;
  9. Poursuivre l’effort de renforcement du cadre juridique de lutte contre les violences faites aux enfants.