Plusieurs villages de la région de l’Ouest ont codifié les rites de veuvage en vue sinon de mettre fin aux souffrances des veuves, du moins de les réduire drastiquement dans leurs localités. De nouveaux villages sont acquis à la même cause comme le témoigne la participation de leurs chefs à l’atelier d’échanges que vient d’organiser le CIPCRE  à la chefferie Bapa.

 Depuis près d’une décennie, le CIPCRE a fait de l’humanisation des rites de veuvage une de ses principales problématiques. Ainsi, près de 15 villages de la région de l’Ouest ont assoupli les souffrances des veuves en mettant sur pied un Code coutumier des rites de veuvage en vue de réglementer la manière d’officier ces rites sans porter atteinte à la dignité des veuves.

Dans le cadre de la mise en œuvre de la deuxième phase du projet Renforcement des Initiatives de Développement Durable et construction de la Paix (RIDECOP 2), le CIPCRE envisage de poursuivre le processus d’humanisation des rites de veuvage dans au moins 20 autres villages de la région de l’Ouest. C’est dans cette optique qu’il a organisé un atelier d’échanges et de plaidoyer sur l’humanisation des rites de veuvage le 03 novembre 2021 dans la salle de réunion de la chefferie de Bapa au profit des membres du Conseil des Chefs Traditionnels de l’Ouest (CCTO) avec la collaboration de la Délégation Régionale de la Promotion de la Femme et de la Famille (DRPFF) de l’Ouest. L’objectif de l’atelier était de contribuer à la systématisation du processus d’humanisation des rites de veuvage par la codification du Code coutumier dans la région de l’Ouest. Spécifiquement, il était question de susciter la réflexion sur l’état des lieux des violences envers les veuves lors des rites de veuvage, d’amener les participants à s’engager dans l’humanisation des rites de veuvage dans leurs villages respectifs, de susciter le partage d’expériences sur la codification des rites de veuvage afin qu’ils s’en approprient le processus.

Parmi les différentes allocutions, on retient celle du DRPROFF qui a présenté l’action du gouvernement pour la protection de la veuve. Cette action se résume par plusieurs textes qui protègent la veuve sur le plan national et les traités sur le plan international que le Cameroun a ratifiés ainsi que l’institution de la journée internationale de la veuve adoptée dans notre pays. Le Directeur national du CIPCRE quant à lui a déroulé un chapelet de souffrances que les veuves subissent lors des rites de veuvage en plus de la douleur de la perte de leur époux.

Les chefs Bapa et Bamendjo chez qui le Code coutumier des rites de veuvage existe déjà ont présenté le processus de déroulement de l’humanisation des rites de veuvage qui  a commencé par des échanges avec le CIPCRE, les notables et les populations, s’est poursuivi par la rédaction du code qui a permis de mettre de côté tous les aspects des rites qui humilient la veuve et bafouent sa dignité pour ne laisser que le symbole car le code des rites de veuvage ne vient pas annuler ce que nos ancêtres nous ont légué. Ainsi, la durée du veuvage dans certains villages est passée de plusieurs semaines à quelques jours ; la veuve peut désormais manger dans une assiette propre ; le bain dans les porcheries a été supprimé ; la veuve peut jouir de sa sexualité sans plus être obligée d’être « lavée » par un membre de la famille, etc. Pour les deux chefs, les souffrances des veuves sont désormais réduites à leur plus simple expression, au point où lors des obsèques, on ne distingue plus la veuve dans la foule comme cela se faisait avant.

En guise de résolutions, les participants ont décidé de restituer le message auprès de leurs Pairs absents. Ceux des chefs qui n’ont pas encore codifié les rites de veuvage dans leurs villages ont sollicité l’accompagnement du CIPCRE pour le faire. A la fin du l’atelier, les participants ont vu leurs connaissances renforcées sur l’humanisation des rites de veuvage. Ceux qui paraissaient sceptiques au départ et pensaient que le projet était une manœuvre des Européens visant à spolier les valeurs africaines, ont compris l’importance de l’humanisation des rites veuvage dont l’objectif affirmé est la sauvegarde de la dignité de la veuve.